Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/499

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

firent dépendre l’indépendance du Bosphore de l’immobilité d’Ibrahim victorieux, et ils appelèrent imprudemment l’Europe à régler le partage de l’Orient, lorsqu’il était manifeste qu’elle le réglerait sans nous et contre nous. En vain y eut-il pour la France et pour le vice-roi accumulation de bonnes chances, savoir : la mort du sultan, la défaite de son armée, la détection de sa flotte, les ministres du 12 mai se mirent en révolte ouverte contre leur propre bonheur et les arrêts apparents de la destinée. Ils arrêtèrent Ibrahim prêt à franchir le Taurus ils reconnurent qu’on devait à peine tenir compte de la victoire de Nézib ; ils exigèrent de Méhémet-Ali la restitution de la flotte turque ; ils apposèrent à l’arrangement direct déjà conclu au profit du vice-roi, le véto de la France. Qu’en résulta-t-il ? La France et l’Angleterre n’étant pas d’accord sur la question égyptienne, la Russie se joignit à l’Angleterre pour nous humilier et nous affaiblir. Animées de passions contre-révolutionnaires, rendues à leurs vieux ressentiments, l’Autriche et la Prusse suivirent. L’Europe entière se trouva d’un côté, la France restait seule de l’autre ! Au milieu de tant de sujets d’affliction, l’Afrique, du moins, nous envoya quelques nouvelles consolantes. De brillants faits d’armes y signalaient notre présence, et, dans les premiers jours du mois de février 1840, Mazagran, défendu par une poignée de Français contre des milliers d’Arabes, avait jeté sur les tristesses de la patrie un reflet de gloire et d’héroïsme.