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conclu que les hommes et les principes de la Restauration devaient être les principes et les hommes du gouvernement nouveau. L’influence de cette opinion s’est retrouvée dans toutes les phases de la longue et stérile session qui vient de s’accomplir. On l’a reconnue dans les débats sur la liste civile, sur l’hérédité de la pairie, sur l’organisation de l’armée ; elle a présidé à la discussion du budget ; elle dirige l’administration de l’empire, et règle son attitude vis-à-vis de l’étranger.

Les autres, et les soussignés sont de ce nombre, ont salué, dans la révolution de juillet, la consécration définitive des principes et des droits proclamés par la grande révolution de 1789. Ces principes et ces droits telle est la base large et puissante sur laquelle ils auraient voulu asseoir le trône. Leurs discours et leurs votes ont été constamment la conséquence de cette pensée.

Ainsi, lors de la discussion de la liste civile, nous avons cru que la royauté nouvelle avait d’autres conditions de force et d’existence que le luxe et la corruption des vieilles monarchies ; que forte de son origine populaire et de la raison publique, elle n’avait besoin ni de frapper les imaginations par son opulence, ni d’acheter des dévoûments ; dans la même discussion, et sur l’insistance du ministère à rétablir, dans notre langage et dans notre droit politique, l’expression féodale de sujets, nous avons dû protester.

Les débats sur la constitution de la pairie ont été un vaste champ où les partisans des doctrines du régime déchu ont fait connaître à la fois leurs désirs et leurs regrets. À les entendre, rien de plus sacré que les priviléges préexistants à la révolution, et, suivant eux, point d’État, point de société possibles hors l’hérédité de la pairie. C’était une pensée de Restauration.

Quant à nous, fidèles au principe d’égalité et de souveraineté nationale, nous avons fait prévaloir le vœu de la France, et l’hérédité a été abolie.

Nous voulions plus : nous demandions que le pouvoir législatif, même dans autre chambre, dérivât d’une délégation du souverain, c’est-à-dire de la nation. Nous ne voulions pas que certains pairs pussent se dire plus légitimes que le roi. Il nous paraissait que la révolution devait élire ses législateurs, comme elle aurait dû instituer ses juges. La majorité en a jugé autrement : le temps et l’expérience prononceront entre elle et nous.

L’armée a été l’objet de notre plus vive sollicitude. Réparer pour le passé, les injustices de la Restauration ; la rendre pour avenir redoutable aux ennemis de la France, sans que la liberté intérieure en fût être menacée ; assurer l’avancement non à la faveur, mais aux services ; répandre l’instruction dans les régiments ; enfin améliorer, sous tous les rapports la condition du soldat, tel était notre but. La proposition de reconnaître les grades et les décorations des Cent-Jours satisfaisait au premier de ces vœux, et elle avait été adoptée par les deux chambres. Il appartenait à une mesure législative de consacrer une réparât qui n’était pas individuelle, mais collective. Sans donner ni refuser la sanction royale le gouvernement a substitué une ordonnance à une mesure