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irrécusable du désintéressement de Louis-Philippe, désintéressement auquel on supposerait que des serviteurs maladroits avaient voulu faire violence. Les choses eurent lieu selon ce petit arrangement : la popularité du roi se vit sauvée d’une première atteinte ; et, pour faire adopter par la chambre un chiffre qu’on désavouait sans y renoncer, on attendit des circonstances plus favorables.

Ces circonstances furent, ainsi que nous l’avons raconté, l’issue non sanglante du procès des ministres de Charles X, la chute de M. Laffitte et son remplacement par M. Casimir Périer. La cour alors se dépouilla de tout scrupule. La chambre, renouvelée, avait nommé une commission moins sévère : on ne parla plus que de doter magnifiquement la couronne. Pour ne pas effrayer prématurément les députés économes des deniers de l’État, les ministres laissèrent en blanc, dans le projet, le chiffre de la liste civile ; mais sous main ils poussaient à l’adoption d’un chiffre très-élevé, et la liste qui courait dans le public menaçait le royaume d’un fardeau de 18 millions 535,500 francs. C’était donner à Louis-Philippe un traitement trente-sept fois plus considérable que celui qu’avait obtenu en France Bonaparte, premier consul, et cent quarante-huit fois plus considérable que celui qui suffit en Amérique au président de la florissante république des États-Unis.

Dans le même temps, un bureau de bienfaisance faisait publier ce qui suit : « 24,000 personnes inscrites sur les contrôles du 12e arrondissement de Paris, manquent de pain et de vêtements.