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dehors des attributions de l’Église. Aussi l’avait-on vue resserrer dans le cercle des disputés théologiques l’exercice du pouvoir spirituel qui lui était confié, consacrant toutes les ressources de sa science à l’analyse de dogmes sans application matérielle possible, négligeant tout le côté physique de l’amélioration des peuples, prêchant même le mépris de la chair, et ne contribuant au soulagement de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre que par ces mots : « La souffrance est sainte » mots qui versent dans l’existence la plus tourmentée toutes les joies de l’espérance, et qui consolent les damnés de la terre, en leur montrant le ciel.

C’était beaucoup, cependant, que cette influence du pouvoir spirituel, même restreinte à cette utilité indirecte ; ce fut assez tant que le pouvoir temporel ne se déploya que par la conquête et par la guerre. Mais le jour vint où l’activité du pouvoir temporel, au lieu de se développer exclusivement par la guerre, se développa par l’industrie. Et ce jour là, l’Église fut naturellement ébranlée jusque dans ses fondements. Car il fallait une science particulière à l’industrie. Et qu’arriva-t-il ? qu’un laïque, Képler, prépara Newton ; qu’un laïque, Gutenberg, inventa l’imprimerie ; que des laïques, les Médicis, frayèrent au commercé des voies nouvelles ; que les progrès des mathématiques, de la physique, de la physiologie, de l’astronomie furent dus en partie à des laïques. Il y eut donc à côté de la science théologique ou sacrée une science pratiqué ou profane ; il s’éleva en face du pouvoir spirituel exercé par l’Église un autre pouvoir spirituel exercé par l’État.