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plus complète, plus rapide, plus joyeusement insensée car toutes ces choses s’accomplissaient au milieu d’une effroyable tempête de bravos, de rires, d’exclamations burlesques ou de cris furieux.

Trop faible pour lutter contre les démolisseurs, M. Arago envoya le frère de M. de Montalivet demander du renfort au commandant général de la garde nationale de Paris. L’envoyé ne reparut pas ; il écrivit que les secours allaient arriver : ils furent vainement attendus. La surprise de M. Arago était extrême : il s’expliquait malaisément que le pouvoir se fit complice de l’émeute. Des ouvriers étaient occupés à abattre la croix de la cathédrale, il voulut les en empêcher : ils répondirent qu’ils ne faisaient qu’obéir à l’autorité, et montrèrent un ordre signé du maire de l’arrondissement.

Du sac de l’archevêché à celui de la cathédrale il n’y avait qu’un pas. Le peuple menaçait de forcer les portes de Notre-Dame où s’étaient réfugiés quelques gardes nationaux commandés par M. de Schonen. M. Arago laisse sa compagnie dams la rue de l’archevêché, s’avance vers le parvis de Notre-Dame, à travers la foule qu’il dominait de toute la tête, et élevant la main. « Vous voyez cette croix qui s’ébranle sous les coups répétés des démolisseurs. L’éloignement la fait paraître petite : en réalité, elle est énorme. Attendrez-vous qu’elle tombe, et, avec elle, cette lourde balustrade en fer qu’entraînera certainement le poids de sa chute ? Retirez-vous donc, ou, je vous le jure, ce soir plus d’un fils pleurera son père et plus d’une femme son mari. » En disant ces mots, M. Arago prend la fuite