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furent tirés ; on désarma deux ou trois postes, et une bande d’hommes violents fit, sur la maison de M. Dupin aîné, une tentative que la force publique eut à peine le temps de venir réprimer. Tout présageait donc un orage pour le lendemain.

Et en effet, dès que le jour parut, des groupes menaçants se formèrent aux environs du Palais-Royal ; mais toutes les avenues en étaient soigneusement gardées. Aucune mesure, au contraire, n’avait été prise pour protéger la demeure de l’archevêque. Des agitateurs mystérieux se mêlent au peuple. Habiles à manier ses ressentiments, ils le détournent du Palais-Royal et l’entraînent à l’archevêché. Le rappel avait été battu mollement dans la matinée, et la garde nationale, ses chefs absents, ne s’était point rassemblée. Cependant, un détachement de la 12e légion, commandé par M. François Arago, descendait du Panthéon à la Cité. Au petit pont, l’adjudant du bataillon, le comte de Clonard, atteignit, par un mouvement involontaire, en agitant son sabre, un homme du peuple. Le malheureux tombe mortellement blessé. On s’empresse autour de lui ; on le porte sanglant au milieu de la foule répandue sur la place du Parvis, et tous de s’écrier : « Vengeance ! vengeance sur l’assassin ! » Le comte de Clonard avait disparu dans le tumulte. M. Arago fit porter le mourant à l’Hôtel-Dieu, où il l’accompagna mais à peine eût-il reparu qu’on l’entoura, en l’accusant du meurtre. Entraîné vers le fleuve où on le voulait précipiter, il ne dût son salut qu’à son esprit d’à-propos et à sa fermeté. La colère du peuple, un moment apaisée, pouvait