Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conspiration bonapartiste, avaient promis de prendre leurs mesures ; et dans la journée même, M. Cavaignac, au Louvre, avait jeté sur une table d’écarté un paquet de cartouches, que les artilleurs de la 2e batterie s’étaient partagé. À cette nouvelle, les hommes du château éprouvent ou feignent d’éprouver une frayeur extrême. On répand les supportions les plus odieuses, les plus gratuites, parmi ceux des artilleurs qui ne partagent pas les opinions républicaines ; on les amène à convenir entr’eux d’un signe particulier de reconnaissance ; des promesses d’argent sont faites ; de l’argent est distribué ; enfin, un ancien militaire, nommé Bicheron, s’engage, dans un entretien avec le général Humigny, à former une bande d’hommes déterminés, pour enclouer les pièces, au premier mouvement.

Le roi, au milieu de cette tourmente, conformait aux besoins de sa politique la manifestation de ses espérances ou de ses craintes. Il témoignait des appréhensions à ceux dont trop de sécurité aurait endormi le zèle, et montrait au contraire beaucoup d’assurance devant ceux qui, plus spécialement compromis, pouvaient redouter le dénouement. Ainsi, tandis qu’il écrivait lettres sur lettres à M. Laffitte, pour lui apprendre qu’un complot se formait dans l’artillerie ; qu’il s’agissait pour les conspirateurs de livrer les canons au peuple ; que la situation était grave ; il avait avec M. Madier de Montjau des conversations où il apportait un visage souriant et des paroles confiantes. L’effervescence populaire dont on lui parlait paraissait lui causer peu de souci ; il affectait même de s’en