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Ney ce fameux arrêt de mort, qui fut un assassinat. Le greffier de la cour fut remarqué, lui aussi ; c’était le même qui avait lu au prince de la Moskowa la fatale sentence. Michel Ney semblait ainsi se venger de ses juges et des Bourbons.

Les accusés furent introduits à leur tour. Leur contenance ne parut ni arrogante ni timide. M. de Chantelauze, qui était malade, avait le visage couvert de pâleur. A côté du prince de Polignac, qu’on distinguait à je ne sais quelle sérénité candide, M. de Peyronnet ne cessa pas un seul instant de se montrer maître de lui. Et, comme s’il eût été indifférent à ces derniers accidents d’une infortune à peu près épuisée, M. de Guernon-Ranville ouvrit une brochure qu’il se mit à lire attentivement.

Les interrogatoires furent tels qu’on devait s’y attendre. M. Pasquier, homme de cour, combina ses questions de telle sorte qu’il fût possible aux accusés de se justifier en rejetant sur Charles X la responsabilité de tous les désastres. Mais ils se gardèrent du piège tendu à leur honneur pour protéger leur vie ; et les réponses qui sortirent de leur bouche furent comme un dernier témoignage de fidélité envers leur maître absent et malheureux.

Aux interrogatoires succédèrent les dépositions. C’était la révolution qui allait passer vivante sous les yeux des ministres de Charles X pour leur demander compte du sang versé. Il y eût là, pour eux, des moments terribles. Les témoins étaient nombreux. L’un disait comment la lutte s’était engagée, et combien de familles, dès le premier jour, avaient été plongées dans le deuil. Un autre rappelait des