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de la guerre a sonné dans la Belgique, de s’y précipiter à la tête de troupes proclamant la liberté du genre humain, de jeter d’autres détachements sur les provinces du Rhin, qui ont été des départements français, d’exciter ou plutôt de seconder le mouvement des peuples contre leurs souverains actuels, en leur promettant des constitutions libres ? Sans doute, c’eût été livrer la France à de terribles hasards ! mais enfin la fortune couronne souvent l’audace ; et qui sait, si à l’heure où je parle, la France, poussée par un chef entreprenant dans la voie des conquêtes, et ressaisissant un territoire à sa portée, qui eût été empressé de se réunir à elle, ne serait pas déjà en état, avec son nom et ses millions de gardes nationales, de braver les vains efforts de l’Europe derrière son triple rempart du Rhin, des Alpes et des Pyrénées ? »

L’assemblée était haletante, mais quand l’orateur prononça ces mots : « Si une guerre défensive était nécessaire, toute notre jeunesse studieuse aurait bientôt quitté les livres pour le mousquet, et s’empresserait de payer sa dette à la patrie. » Oui ! oui ! cria-t-on des tribunes publiques ; les applaudissements retentissaient avec violence ; la France guerrière s’était un moment réveillée.

Le caractère modéré de M. Bignon, son âge, les emplois élevés qu’il avait occupés, sa position la veille encore officielle, son expérience des hommes et des affaires, tout contribuait à rendre imposant le viril enthousiasme de son discours. Les éloges obligés qu’il donnait au monarque n’étaient pas de