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et soumise, dans tous les cas, au premier caprice des batailles. Ces considérations s’appuyaient sur des intérêts pressants. Privée tout-à-coup des riches débouchés que lui fournissaient les colonies hollandaises, la Belgique ne pouvait se donner à la France, sans que la France se donnât à la Belgique. La réunion des deux pays n’avait rien du caractère d’une conquête, et n’aurait fait, en décuplant leur puissance, que sceller entr’eux un noble pacte de fraternité. Il fallait, d’ailleurs, un gouvernement à la Belgique déclarée indépendant. Nouvelle source de difficultés. Car, république, l’Europe pesait sur elle et l’écrasait ; monarchie, la diplomatie l’asservissait, en lui imposant un roi. Enfin, comme si la fortune eût voulu montrer tout ce que pouvait cacher de tempêtes cette indépendance si difficile à fixer, la Belgique, depuis son affranchissement, était accablée de toutes sortes de maux. Des pensées redoutables étaient éveillées dans le peuple par les encouragements que donne à l’audace tout changement de règne, et par l’espoir de la licence impunie. Des hordes de malfaiteurs parcouraient les campagnes ; on avait dévalisé des voyageurs, dépouillé de riches négociants, dévasté des fabriques ; les propriétés étaient menacées ; l’anarchie gagnait de proche en proche. Et pour faire face aux dangers de cette situation, il n’y avait qu’un gouvernement qui s’était créé lui-même, gouvernement d’hommes nouveaux que sa nécessité rendait possible, non populaire, et qui était sans force parce qu’il était sans prestige.

Ainsi, tout semblait inviter la Belgique à devenir