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des éditeurs responsables et imposait un cautionnement. Les plaintes de la tribune trouvèrent dans la presse de bruyants et formidables échos. Épouvantée de tout le bruit qui se faisait autour d’elle, la chambre des pairs avait parlé de modifier la loi du 5 février, et les ministres l’avaient châtiée aussitôt par une promotion de pairs qui, en altérant sa majorité, avait fait entrer dans son sein un grand nombre de bourgeois. Cela même ne suffisait plus. L’effervescence allait croissant. La Minerve voulait que le cens d’éligibilité fut détruit. Le Constitutionnel demandait avec ironie si deux cents députés représentaient bien fidèlement trente millions d’hommes. M. Bavoux adressait à la jeunesse des écoles des discours enflammés, et en expliquant les articles 86 et 89 du code pénal, qui punissent le simple complot contre la vie du roi des mêmes peines que le crime consommé, il disait : « Le rêve de Marsyas, puni par Denys de Syracuse, comme crime de lèze-majesté, et la mort de ce gentilhomme, exécuté aux halles pour avoir eu la pensée d’assassiner Henri III, ne sont-ce pas là des faits légitimés par notre code actuel, malgré la réprobation constante et universelle de la postérité ? » On comprend quel devait être l’effet de semblables paroles sur de jeunes cœurs. Des troubles eurent lieu à l’école de droit, et M. Bavoux fut traduit devant la cour d’assises. Mais la bourgeoisie applaudissait à son courage ; le jury le déclarait non coupable ; et, au sortir de l’audience, les étu-