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trages envers le gouvernement. Elle a considéré comme un outrage la supposition que le gouvernement pût employer l’autorité des ordonnances, là où l’autorité de la loi peut seule être admise. Ainsi le texte formel de la Charte, la pratique suivie jusqu’ici par la couronne, les décisions des tribunaux, établissent qu’en matière de presse et d’organisation électorale, les lois, c’est-à-dire le Roi et les chambres, peuvent seules statuer.

Aujourd’hui donc, le gouvernement a violé la légalité. Nous sommes dispensés d’obéir ; nous essaierons de publier nos feuilles sans demander l’autorisation qui nous est imposée : nous ferons nos efforts pour qu’aujourd’hui, au moins, elles puissent arriver à toute la France.

Voilà ce que notre devoir de citoyen nous impose, et nous le remplissons.

Nous n’avons pas à tracer ces devoirs à la chambre illégalement dissoute mais nous pouvons la supplier, au nom de la France, de s’appuyer sur son droit évident et de résister autant qu’il sera en elle à la violation des lois. Ce droit est aussi certain que celui sur lequel nous nous appuyons. La Charte dit, article 50, que le Roi peut dissoudre la chambre des députés, mais il faut pour cela qu’elle ait été réunie, constituée en chambre ; qu’elle ait soutenu enfin un système capable de provoquer sa dissolution. Mais, avant la réunion, la constitution de la chambre, il n’y a que des élections faites. Or, nulle part la Charte ne dit que le Roi peut casser les élections. Les ordonnances publiées aujourd’hui ne font que casser des élections, elles sont donc illégales, car elles font une chose que la Charte n’autorise pas. Les députés élus, convoqués pour le 3 août, sont donc bien et dûment élus et convoqués. Leur droit est le même aujourd’hui qu’hier. La France les supplie de ne pas l’oublier. Tout ce qu’ils pourront pour faire prévaloir ce droit, ils le doivent.

Le gouvernement a perdu aujourd’hui le caractère de légalité qui commande l’obéissance. Nous lui résistons pour ce qui nous concerne ; c’est à la France à juger jusqu’où doit s’étendre sa propre résistance.

Ont signé les gérants et rédacteurs des journaux actuellement présents à Paris :

MM. Gauja, gérant du National.
Thiers, Mignet, Carrel, Chambolte, Peysse, Albert Stapher, Dubochet, Rolle, rédacteurs du National.
Leroux, gérant du Globe.
De Guizard, rédacteur du Globe.
Sarrans jeune, gérant du Courrier des Électeurs.
B. Dejean, rédacteur du Globe.
Guyet, Mousette, rédacteurs du Courrier.
Auguste Fabre, rédacteur en chef de la Tribune des Départements.
Année, rédacteur du Constitutionnel.
Cauchois-Lemaire, rédacteur du Constitutionnel.
Senty, rédacteur du Temps.
Haussman, rédacteur du Temps.
Avenel, rédacteur du Courrier Français.