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Qu’on y réfléchisse, en effet : on restera convaincu que, de toutes les combinaisons politiques possibles en 1814, aucune ne répondait aussi complétement que l’avènement des Bourbons aux vrais intérêts de la bourgeoisie. Le roi de Rome et la régence de Marie-Louise, c’était l’ombre redoutable de l’Empereur assise sur le trône, ou, plutôt, c’était l’Empereur gouvernant encore la France du fond de son exil. Quant au duc d’Orléans, on ne le connaissait pas encore assez, et il fallait quelques années pour que la bourgeoisie apprît à l’apprécier, et s’accoutumât à le saluer comme son chef naturel. Seul, Louis XVIII se présentait pour reprendre la monarchie constitutionnelle au point où Louis XVI l’avait laissée ; seul il pouvait, ainsi que cela convenait à la bourgeoisie, exercer le pouvoir royal en sous-ordre.

Le retour des Bourbons, patronés par nos ennemis, plaçait sans doute la France, à l’égard de l’Europe, dans des conditions nécessaires d’infériorité et d’indépendance. Mais qu’importait à la haute bourgeoisie cette position subalterne de notre pays, s’il en devait résulter une paix durable, l’ouverture des ports, l’extension ou l’affermissement des relations commerciales, le règne de l’industrie, enfin ? Pour les gagneurs d’argent, l’humiliation était suffisamment couverte par le profit.

N’y avait-il pas, d’ailleurs, un gage de stabilité, bien propre à séduire l’égoïsme d’une société mercantile, dans la restauration de ce dogme de la légi-