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vit reparaître le visage altéré, mais s’étudiant à maîtriser son trouble. Il ne voulait plus partir il acceptait la responsabilité d’une défection qui n’était pas son œuvre ! Depuis, cette responsabilité terrible n’a cessé de peser sur lui : que n’a-t-il eu le courage d’en rejeter le fardeau ? Laisser croire qu’on est coupable, lorsqu’on tire profit de la publique erreur, c’est l’être doublement.

Il résulte de ce récit que ce n’est point par quelques faits accidentels, mais par un ensemble de causes irrésistibles, que s’explique la catastrophe qui atteignit le roi de Rome au sein même des débris de la fortune paternelle.

Et d’abord, au nombre de ces causes, vient se placer la lassitude des généraux qui n’avaient plus de hautes espérances à concevoir. Napoléon avait commis une faute irréparable, en accordant à ses grands officiers des faveurs telles qu’il ne leur restât plus rien à désirer. Lorsqu’ils furent comblés d’honneurs, gorgés de richesses, la fatigue les prit. Et certes Napoléon ne les avait pas ménagés. Ses victoires étaient des relais ; ses armées, des chevaux de rechange qui tombaient sous lui d’épuisement. Combien d’âmes eussent été capables de suffire, comme la sienne, à cette course haletante vers l’inconnu ? Ceux d’entre ses généraux devant qui l’horizon des désirs ne pouvait guère plus reculer, avaient donc fini par se décourager ; l’amour du repos les avait gagnés. Maisons de campagne, hôtels somptueux,