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qu’un voltigeur du 2e ayant voulu déserter, ses camarades levèrent sur lui leurs sabres.

Une scène d’enthousiasme avait eu lieu dans la matinée : la Dauphine était arrivée de Dijon à Rambouillet, à travers des périls, évités au moyen d’un déguisement. Cette princesse avait la voix rude, le front sévère, l’abord glacial ; et le malheur, qui l’avait prise au berceau, semblait avoir tari en elle toutes les sources de la sensibilité. Les gardes l’aimaient cependant, parce qu’elle avait toujours témoigné aux défenseurs les plus intimes des personnes royales une sollicitude active et prévoyante. Quand elle traversa le camp, ils se précipitèrent sur son passage. Elle les salua en pleurant, et eux, ils agitaient leurs épées avec des cris fidèles. Mais c’était la dernière explosion d’un dévouement qui, faute d’être encouragé, devait bien vite s’éteindre.

En apercevant cette princesse dont les yeux avaient renfermé tant de larmes, Charles X s’avança, les bras étendus, vers la fille de Louis XVI, et des sanglots se mêlèrent à ces premiers embrassements. « Nous voilà, je l’espère, réunis pour toujours », dit la Dauphine.

A Rambouillet, château de plaisance, demeure somptueuse ou tant de princes avaient oublié dans les plaisirs combien il faut que le peuple souffre pour qu’un roi s’amuse ; à Rambouillet, où, le 26 juillet, Charles X lui-même était allé se délasser des fatigues de la chasse, pendant que ses ordonnances embrasaient Paris, il y avait tout au plus en ce moment de quoi héberger cette famille en fuite. Pour payer les dépenses de bouche de sa maison