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frayeur les promesses dont il avait bercé ses jeunes amis. Il appréhendait leurs reproches. N’allait-on pas l’accuser d’avoir trahi la cause de la révolution ? Lui qui, au sein du carbonarisme, s’était déclaré l’adversaire implacable des royautés ; lui qui avait si énergiquement combattu, dans les conciliabules secrets de la Restauration, la candidature du duc d’Orléans, appuyée, disait-on, par Manuel, que répondrait-il aux hommes qui avaient suivi sa bannière, lorsqu’ils lui viendraient demander compte de la république étouffée à son berceau, de leurs illusions détruites, de leur sang versé dans une autre espérance ? En proie à toutes ces agitations et tremblant pour sa popularité en péril, il prit le parti d’atténuer par des conditions tardives l’immensité de la concession qu’il venait de faire. La rédaction d’un programme fut débattue entre lui et MM. Joubert et Marchais. Voici la vérité sur ce programme, qui devait être l’objet de tant de controverses.

Apres une discussion assez approfondie, un acte fut rédigé à l’Hotel-de-Ville : il contenait le résumé des conditions auxquelles M. de Lafayette consentait à s’humilier sous le pouvoir d’un roi.

M. de Lafayette prit ce papier qui pouvait changer les destinées d’un peuple, et se rendit au Palais-Royal avec l’intention de faire apposer au contrat convenu la signature du duc d’Orléans. Mais, en l’apercevant, le prince accourut vers lui avec de douces paroles. Ils parlèrent de la république, de celle des États-Unis ; M. de Lafayette pour dire qu’elle avait toutes ses sympathies ; le duc pour élever des doutes sur la possibilité d’une application