Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/343

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cette proclamation était rédigée avec beaucoup d’art. On y répétait fréquemment le nom du duc d’Orléans, pour que ce nom, peu connu du peuple, se gravât néanmoins dans son esprit. En y parlant du drapeau tricolore et de Jemmapes à une foule peu soucieuse des formes politiques, on intéressait à l’élévation de l’élu de la bourgeoisie ce sentiment national qu’avaient si puissamment exalté les victoires de la République et de l’Empire. Enfin on invoquait, pour mieux la détruire, la souveraineté du peuple : vieille ruse des ambitieux sans courage !

La lecture d’un pareil manifeste devait naturellement émouvoir l’assemblée. L’éloge du duc d’Orléans passa de bouche en bouche. Que fallait-il de plus pour créer un parti puissant parmi ces hommes ? Le duc d’Orléans, c’était la monarchie et un nom !

Le général Dubourg s’étant présenté sur ces entrefaites en habit de général et une cravache à la main, les députés ne virent dans sa visite qu’une insolente témérité. On refusa de l’entendre et même de le recevoir. L’autorité légale s’organisait déjà sur les débris des pouvoirs insurrectionnels, et la domination des hommes tout-à-fait nouveaux commençait à pâlir devant la puissance des réputations acquises.

Mais il importait de détourner au profit de la monarchie l’autorité morale de cette révolution, dont la force matérielle était alors sur la place de Grève. Les députés résolurent d’opposer le palais Bourbon à l’Hôtel-de-ville, et, sous prétexte d’aucune délibération sérieuse ne pouvait avoir lieu