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bours, qui battaient la charge, prirent la fuite ; un ouvrier, en abattant son arme, tua celui qui marchait devant lui ; le désordre se mit dans la colonne, et elle se replia précipitamment sur, elle-même. M. Charras se jeta en ayant, son chapeau au bout de son épée, et suivi par un homme du peuple nommé Besnard, qui agitait avec enthousiasme un drapeau tricolore. Le feu des Suisses redoubla ; heureusement, quelques tirailleurs parisiens parurent aux fenêtres des maisons voisines, et se mirent à faire feu à leur tour sur les Suisses avec tant de succès, que ceux-ci, abandonnant la maison en construction, regagnèrent la caserne à travers les jardins. Charras, Cantrez, autre elève de l’École polytechnique, et Besnard, s’avancèrent de nouveau, suivis par quelques ouvriers, et bientôt après, par la masse. Des tirailleurs s’établirent dans les jardins et sur les toits d’une maison voisine de la caserne, qui se trouva ainsi attaquée de toutes parts. Les Suisses avaient garni toutes les fenêtres de matelats et se défendaient en désespérés. Les assaillants, de leur côté, presque tous ouvriers, soutenaient le feu avec la plus étonnante intrépidité. À leur tête combattaient trois élèves de l’École ; MM. Vanneau, Lacroix et d’Ouvrier. Le premier reçut dans le front une balle qui l’étendit raide mort ; les deux autres furent grièvement blessés. Un étudiant, M. Alphonse Moutz, eût la cuisse traversée d’une balle, et mourut cinq jours après de sa blessure. Un professeur de mathématiques, M. Barbier, fut atteint au bras gauche. D’autres tombèrent, dont les nom sont restés obscurs : ils étaient du peuple, ceux-là !