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et des coups de fusil retentissaient dans les rues voisines. Quelques-uns de ceux qui s’étaient emparé du poste, veulent en sortir pour aller combattre. Les gardes nationaux les arrêtent, et l’un d’eux s’écrie : « Que faites-vous ? l’on va nous croire hostiles ! — C’est bien ainsi que je l’entends », répond M. Higonnet avec mépris, et il menace son interlocuteur de le coucher en joue. Ainsi, au sein de cette affreuse mêlée dans laquelle des ouvriers et des enfants allaient se précipiter avec un aveuglement chevaleresque, la plupart des bourgeois n’apportaient que défiance et terreurs. Ils cherchaient l’ordre dans la révolte, et ne voyaient que la conservation de quelques boutiques dans la chute possible d’un trône.

Mais déjà les robustes habitants des faubourgs se levaient en masse, et s’ébranlaient pour inonder le centre de Paris. Des groupes se formaient à la porte Saint-Denis et à la porte Saint-Martin. À l’entrée du faubourg Saint-Denis, on commençait une barricade avec une grosse charrette de moëllons. Les ouvriers imprimeurs se réunissaient dans le passage Dauphine, où M. Joubert avait transformé en arsenal son magasin de librairie. Sur un autre point, ouvrant à deux battants les portes de sa maison de roulage, M. Audry de Puyraveau appelait à grands cris les combattants et leur distribuait des mousquets. Dans le faubourg Saint-Jacques, les étudiants passaient leurs pistolets à leur ceinture et s’armaient de leurs fusils de chasse. Sur la place de la Bourse parurent, conduites par M. Étienne Arago, deux longues mannes remplies d’armes et d’uniformes impériaux. Elles