Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/228

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

28, il descendit dans la rue, il ne s’était encore rendu compte ni de ses affections, ni de ses haines, mais il souffrait, il avait respiré l’odeur de la poudre que fallait-il de plus ? D’ailleurs, l’amour du péril et le goût des aventures sont naturels à ceux que la misère a long-temps ployés sous sa rude discipline.

Comme c’est par les signes extérieurs des choses que se fondent les pouvoirs humains, c’est aussi par là qu’ils s’écroulent. Le peuple se mit, tout d’abord, à proscrire dans cette société où il se sentait mal à l’aise, ce qu’elle avait de plus élevé, et dans ce qu’elle avait de plus élevé, ce qui était le plus apparent. Il insulta l’idée monarchique dans tout ce qui en était un symbole. Il effaça les enseignes des fournisseurs de la cour et traîna dans la boue les emblêmes de la royauté.

Tout cela n’était encore que du désordre. Le drapeau tricolore fut déployé. Alors la révolution commença.

Dans ces trois lambeaux d’étoffe, de couleur diverse, il y avait pour le peuple toute une histoire héroïque et touchante. C’était la France qui allait redevenir la première nation du monde ; c’était l’épopée impériale qui allait recommencer ; qui sait enfin ? c’était l’Empereur qui n’était pas mort. Au poste de la banque parurent deux hommes de l’Empire. L’un, M. Dumoulin, portait un chapeau à plumes et l’uniforme d’officier d’ordonnance. L’autre, le commandant Dufays s’était déguisé en ouvrier : il avait enveloppé sa tête d’un foulard rouge et noué autour de ses reins un drapeau tricolore. Ils mar-