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une horde de barbares courant au pillage à travers le sang. L’amour de l’or possédait son âme et ajoutait à la frayeur que lui inspirait ce peuple, qui se compose de pauvres. Timide avec véhémence, et prompt à écraser sous son humeur tyrannique quiconque la provoquait en paraissant la redouter, il aimait le commandement, parce qu’il promet l’impunité à la violence. Du reste, son énergie ne prenait sa source que dans la ruse, mais la ruse chez lui était merveilleusement servie par un tempérament aigre et bilieux. Aussi apportait-il un immense orgueil à faire de petites choses. D’autant plus hautain en apparence qu’il était plus humble en réalité, son empire au sein de l’abaissement avait quelque chose d’irrésistible ; et jamais homme ne fut plus propre que lui à faire prévaloir de pusillanimes desseins ; car il ne les conseillait pas, il les imposait.

Casimir Périer aurait donc certainement étouffé la révolution à son berceau, s’il n’avait eu besoin pour cela que de l’appui de ses collègues. Mais ce n’était pas a eux qu’obéissaient ce jour-là les événements.

Je l’ai déjà dit : après avoir cédé à un premier élan, beaucoup craignirent de s’être trop engagés, et comptant peu sur la clémence royale, ils résolurent de généraliser la résistance et d’intéresser le peuple à leurs périls. C’est ainsi que, dès le 26, le bruit se répandit parmi les bourgeois qu’on avait pris le parti de fermer les ateliers et de pousser les ouvriers sur la place publique. On s’adressa aussi à l’autorité judiciaire pour la compromettre. On y réussit aisément, les tribunaux se recrutant, surtout, dans la bourgeoisie ; et les gérants du Courrier Français, du