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ces qui ont pour objet le bien-être des hommes, et dont l’application n’attend plus pour améliorer le sort du peuple lui-même, que le changement du milieu impur dans lequel il souffre et s’agite.

Que savons-nous, après tout ? Pour que le progrès se réalise, peut-être est-il nécessaire que toutes les chances mauvaises soient épuisées. Or, la vie de l’humanité est bien longue, et le nombre des solutions possibles bien borné. Toute révolution est utile, en ce sens, du moins qu’elle absorbe une éventualité funeste. Parce que d’une condition malheureuse les sociétés tombent quelquefois dans une condition pire, ne nous hâtons pas de conclure que le progrès est une chimère. Je me figure un char lancé par des mains prévoyantes : la route, au moment du départ, est belle, large, parfaitement unie ; à mesure que la char avance, la route devient étroite et bourbeuse ; mais ne voyez-vous pas que le but se rapproche, à mesure qu’avance le char ? Aussi bien, il est aisé de découvrir jusque dans la succession des calamités générales, une loi souverainement intelligente et logique. Si tout dépendait du hasard, les événements seraient plus mêlés et il serait moins facile d’en suivre la filiation. Si au contraire, un génie malfaisant gouvernait le monde, il est probable que, dans les souffrances publiques, la forme serait aussi monotone que le fond, et que l’oppression serait moins souvent châtiée. Courage donc ! Ne voyons, s’il se peut, dans les tyrannies qui s’élèvent