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habileté la monotonie du mètre par des coupes neuves et pittoresques ; elle surveilla le choix de ses épithètes, et colora hardiment son style devenu figuré et luxueux, de pauvre et uniforme qu’il était dans ses premiers vers ; elle s’essaya dans plusieurs genres de poésie avant de re¬ connaître le plus convenable à son génie.

D’abord elle composa, sous le titre d ’Enfantine, une charmante ballade qui joint à la richesse du coloris les plus exquises délicatesses de la naïveté. C’est un chef- d’œuvre qu’on peut comparer à tout ce que M mc Des¬ bordes -Valmore a fait de mieux sous l’influence de l’amour maternel. Cette description du paradis, mise à la portée de l’enfance, a de quoi nous tenter, lorsque l’imagination de M®° Ségalas semble nous le promettre. La Petite Anna et la Leçon sur la Bible sont encore de la même famille que cette délicieuse Enfantine.

Elle publia ensuite des élégies dramatisées, comme celles de Millevoye, mais plus savamment versifiées : La pauvre Femme, la jeune Fille mourante, Qui sait le dé¬ but sait lafin, sont des scènes du plus touchant pathé¬ tique, de la plus haute philosophie : quelles admirables strophes !


A vous encor, mes sœurs, cet avenir qui brille ;

A vous tous ces plaisirs bruyants de jeune fille, Puis cet anneau d’hymen, ce mot dit en tremblant, Et ces grains d’oranger, couronne virginale ;

Moi, pour voile de noce et robe nuptiale J’aurai mon linceul blanc ;

Lugubre vêtement jeté sous une pierre Qui tient ensevelis dans une étroite bière Bien des illusions, bien du bonheur rêvé ;

Qui tombe par lambeaux sous la terre jalouse.

Et que les battements d’un cœur déjeune épouse N’ont jamais soulevé?