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mouiller à l’instant ses yeux de nobles larmes. Elle lut davantage ; elle lisait lentement ; son esprit fécond et ré¬ fléchi, dès les premières pages d’un livre, allait volon¬ tiers à ses propres pensées suscitées en foule par celles de l’auteur. Elle savait l’anglais et s’y fortifia ; cette lan¬ gue nette, sensée, énergique, lui devint familière comme la sienne propre. D’anciens amis de sa famille, MM. Suard et De Vaines, l’encouragèrent à de premiers essais avec une bienveillance suivie, attentive. Un piquant morceau écrit en 1807, des Amis dans le Malheur, me parait con¬ tenir. quelques allusions à cette situation des années précédentes. Tous les amis de M IIc de Meulan ne furent pas sans doute pour elle aussi essentiels, aussi effectifs que MM. De Vaines et Suard. Les mêmes personnes qui, plus tard, la plaignaient si charitablement d’être deve¬ nue journaliste, purent la faire quelquefois sourire ironiquement par leurs conseils empressés et vains. «Beaucoup d’amis à compter, disait-elle, sans pouvoir «y compter ; beaucoup d’argent à manier, sans pouvoir «en garder ; beaucoup de dettes, pas de créances, beau- «coup d’affaires qui ne vous rapportent rien. » Elle son¬ geait probablement dans ces derniers mots à scs propres embarras domestiques, à cette fortune de plusieurs millions, entièrement détruite, qu’elle sut arranger, liquider comme on dit, sans en rien sauver que la satis¬ faction de ne rien devoir. Elle déploya à ce soin, durant des années, une faculté remarquable d’action et d’en¬ tente des affaires, qu’elle contint du reste en tout temps à son intérieur.

Le premier essai littéraire de M n ° de Meulan fut un roman en un volume, intitulé les Contradictions ou Ce qui peut en arriver, et publié en l’an VII : elle avait vingt- six ans environ. Ce début me semble caractéristique, étant d’un auteur si jeune et femme. Le héros, au pre-