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série de réactions s’éclaire singulièrement si on les rapproche de l’enseignement qui nous est fourni par les paroles et réflexions du sujet. D’une part, Armande ne fait pas de très grands efforts de volonté ; l’expérience, en se répétant, lui paraît monotone, elle s’en lasse, elle n’apporte qu’un zèle de politesse ; toutes les réflexions qui lui échappent et que j’ai notées — il y en a à peu près 200 — sont indifférentes et atones. C’est là, à mon avis, ce qui explique en partie la lenteur de ses réactions ; elle ne s’est pas donnée avec toute sa volonté, et la courbe de ses réactions est aussi, en partie, une courbe de caractère. J’ignore, bien entendu, si, dans un moment d’excitation forte de la volonté, elle pourrait donner des réactions beaucoup plus rapides, des réactions de 9 et de 8 centièmes, comme sa sœur le fait si fréquemment. Marguerite a montré, au contraire, une application soutenue, un zèle réel ; le désir répété qu’elle exprime d’aller vite, la régularité de sa courbe de moyenne et la brièveté de ses réactions prouvent une attention fortement concentrée ; mais, d’autre part, ce nombre si élevé de réactions anticipées nous démontre une légère incoordination des mouvements rapides, et une faiblesse de la volonté comme frein ; son émotivité et ses regrets, si vifs quand elle déplore la lenteur de ses réactions, sont des faits bien caractéristiques qui confirment notre interprétation.

En résumé, nous relevons chez Armande une attention normale, sans effort marqué ; chez Marguerite des efforts d’attention continus, extrêmement énergiques, avec des signes d’incoordination. On remarquera en passant combien ce test ressemble, par ces résultats, à celui de la correction d’épreuves : tout indique, du reste, ce rapprochement ; d’une part la plus grande vitesse de Marguerite dans les deux genres d’expériences, et, d’autre part, ses signes d’incoordination, se traduisant, dans un cas, par des lettres barrées à tort, et, dans l’autre cas, par des