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Aussitôt après, je lui demande les images qu’elle a eues. Ces images sont fort simples, elles se réfèrent seulement aux lieux où se passe la scène. C’est une visualisation du cadre, rien de plus : « J’ai eu une image de notre jardin. Puis la rue Fouquet, avec nous en bicyclette. Puis S…, la rue Nationale, puis la forêt, la maison du garde, la Madeleine, puis près du petit pont. » II me semble que cette série d’images illustre la pensée à peu près aussi sommairement que cinq images dans un livre illustrent 20 pages de récits de voyage. Mais je n’ai pas fait assez de questions minutieuses à Armande, et je ne puis pas me rendre compte exactement de ce qu’elle a pensé. L’expérience avec Marguerite est beaucoup mieux faite (4 juin 1902). La voici :

Je donne d’abord le récit parlé de Marguerite, puis la description parlée de ses images, et enfin l’énumération de ses réflexions. C’est dans cet ordre que l’étude a été faite.

Récit parlé de Marguerite. — « Eh bien, en arrivant, nous nous habillerions en costume de bicyclette et nous ferions une promenade, si nous étions libres d’aller où nous voudrions. Trois heures, on ne peut pas faire grand’chose… Nous irions voir A… (une amie) à M…. »

Images de Marguerite. — « Je le dis en gros, parce que je n’étais pas prévenue. Je me suis représenté notre rue Fouquet, puis la route de F…. Quand j’ai dit que nous mettrions nos costumes de bécane, j’ai vu nos robes et nos ceintures comme si nous les avions déjà. C’est sur Armande que je les ai vues. Puis, j’ai vu un peu le village en ensemble, je me suis représenté l’emplacement plutôt que les personnes. J’ai vu la route de la table du Roi à M… ; mais c’est drôle. Je ne me suis presque pas représenté les bicyclettes. J’ai aperçu la ville de M… et I… (une amie) une jeune fille en noir, pas très distinctement… j’ai vu une petite rue assez sombre, avec bâtiment gri-