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Nicolas à Gênes ou Savone et l’apparition de la cartographie génoise. Les marins de la République ligurienne furent, durant le xiiie siècle, à la solde des rois des Deux-Siciles.


II. La boussole.


La carte marine ne va pas sans l’aiguille aimantée, nécessaire pour déterminer la position respective de deux points, dont on apprécie à l’estime la distance. Mais les deux notions de carte et d’aiguille aimantée ne sont pas corrélatives. Au xive siècle, les marins anglais n’achètent aux comptoirs de l’Écluse, en Flandre, que des aiguilles de mer, habituellement désignées du nom de l’aimant qui les magnétise, « sailstone[1]. » Les Islandais serrent précieusement dans le trésor de leurs églises des pierres de soleil ou pierres de route, « leidarstein[2], » dont le passage d’une saga dit assez l’emploi : « Le temps était couvert et si noir qu’on ne pouvait savoir de quel côté était le soleil. — Où est le soleil ? demanda le roi Olaf à Sigurd. — Dans cette direction, répondit Sigurd en étendant la main. Et le roi, ayant fait apporter une pierre de soleil, la tint horizontale et reconnut, lorsque la pierre eut papilloté, que la réponse était juste[3]. » Mais, pas plus que les Anglais, les Scandinaves ne connaissent la carte marine.

À vrai dire, l’aiguille de mer ne fut d’un maniement commode pour faire le point que du jour où elle devint un instrument de précision. Comment et quand eut lieu ce progrès ?

De même que les autres marins du Nord, les Français avaient adopté le petit instrument vanté par Alexandre Neckam, dès les années 1180-1187, dans le cours qu’il professait au pied de la mon-

  1. Ou encore « dial ; » les aiguilles étaient dites « sailing needles. » (Inventaire de la barge royale d’Angleterre Mary en 1338 et achats faits à l’Écluse pour la nef royale la George en 1315, publiés ou analysés par Nicolas, History of the Royal Navy, t. II, p. 180, 444 et 476.)
  2. En 1318, 1343, 1394, diverses églises d’Islande sont en possession de ces mystérieuses pierres, dont l’une est dite dans une gaine. (Thoroddsen, Geschichte der isländischen Geographie, traduit du suédois en allemand par August Gebhardt. Leipzig, 1897, I, 51, note 2.)
  3. Vie de S. Olaf, Formannasögur, V, 341, et Biskupasögur, I, 565, 674, citées par S. Ruge, Geschichte des Zeitalters der Entdeckungen. Berlin, 1881, in-8o, p. 21, et par Thoroddsen, ouvr. cit., I, 51, note 2.