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UN INVENTAIRE DE BORD
EN 1294
ET
LES ORIGINES DE LA NAVIGATION HAUTURIÈRE.


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En novembre 1293, le vaisseau Saint-Nicolas, de Messine, revenait de Tripoli de Barbarie, avec un chargement de cuirs et de pelleteries, lorsqu’il rencontra dans les eaux d’Agosta une galère de Nice. La galère, armée en course par Renier Grimaldi, futur amiral de France, et par divers particuliers génois, était en quête d’aventures. Il y avait alors abstinence de guerre, et les Siciliens s’y fiaient. Mais la haine que la guerre des Vêpres siciliennes avait déchaînée entre ces insulaires et les marins génois au service des Franco-Angevins, était trop vivace pour que l’équipage de la galère laissât échapper l’aubaine d’une vengeance.

Le Saint-Nicolas fut amariné sans peine, remorqué jusqu’à Tarente, et vendu avec tout son chargement dans ce pays, qui dépendait des rois angevins de Naples. Les marins du bord furent emprisonnés dans un des châteaux de la province. Relâchés bientôt, ils déposèrent une plainte entre les mains de l’infant Frédéric, vice-roi de Sicile pour le roi Jacques d’Aragon. L’infant la fit parvenir, par l’intermédiaire du comte Jean de Montfort, chambellan du royaume de Naples, au roi Charles le Boiteux, et, le 8 mai 1294, le capitaine de Tarente recevait l’ordre de rendre justice aux plaignants ; suivait l’inventaire, qu’ils avaient eu soin de dresser, de tous les objets qui se trouvaient à bord au moment de la prise.

C’étaient, en fait de marchandises, des cuirs de bœufs, de chameaux, des peaux de renards, de chacals peut-être, d’hyènes et de chats sauvages, des toiles gommées, dites bougrans, empilées