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le secret de la marquise

— Oui, dit-elle, Hector, pouvez-vous l’entendre !

— Parlez, je vous écoute.

Madame de Montreuil se recueillit un instant. Le jeune, homme l’examinait avec attention, se sentant réellement attristé en constatant le grand changement qui, depuis quelques semaines, s’était opéré sur le beau visage de sa mère. Il fallait que cette femme eût beaucoup souffert pour changer à ce point, et lui dans son égoïsme d’amoureux, il l’avait presque oubliée.

— Ma pauvre mère, dit-il en baisant les mains patriciennes de la marquise, ne craignez pas de vous épancher avec votre fils, il saura vous comprendre, si vous croyez avoir eu des torts à son endroit, il vous les pardonne de tout cœur en ne vous demandant qu’une faveur, c’est de ne plus vous faire de chagrin à ce sujet. »

— Oh ! merci, Hector, dit la marquise en le tenant pressé sur son cœur, puis-je me plaindre lorsque Dieu m’a donné un fils tel que toi.

Puis elle commença en ces termes :

« Mon premier cri creusa le tombeau de ma mère. Mon père, le duc de Castelnoy, était un homme froid, sévère, qui m’élevait dans la crainte. Les premières années de mon enfance s’écoulèrent tristement ; j’avais une nature vive, impressionnable, avide d’affection, je n’étais entourée que de cœurs secs. Je ne me souviens pas avoir jamais reçu un baiser de mon père. Il faisait de longues absences à la cour, me laissant à la charge de ma gouvernante, femme revêche, pour laquelle j’éprouvais beaucoup d’éloignement ; elle me grondait sans cesse, me rendant la