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que la balance européenne ne pouvait être maintenue qu’avec une France, et une France tout entière. L’équilibre européen sauva donc la monarchie de Louis XIV compromise par la révolution.

Mais l’effet le plus merveilleux de l’équilibre européen, le voici. L’établissement des Turcs à Constantinople fut sans doute une honte pour l’Europe à une époque ; et, de nos jours, c’est une sauvegarde, une nécessité. Cet empire ottoman tomberait sans presque de résistance, si les forces équilibrantes de l’Europe ne lui fesaient un rempart. Mais pourquoi le soutiennent-elles ? Parce que Constantinople évacuée par les Turcs serait une fameuse pomme de discorde entre les grandes puissances. Napoléon ne rêvait que Constantinople en Égypte, à Tilsit, à Erfurth, et il disait de Sidney Smith à Ste.-Hélène : cet homme-là m’a fait manquer ma destinée, parce qu’il la trouvait la mieux située de toutes pour le siège d’un empire. Il vengeait bien la politique de Constantin, qu’on a blâmé d’avoir abandonné Rome.

Oui, messieurs, l’équilibre européen est une création salutaire du droit des gens positif, et il faudrait que l’Europe songeât enfin à l’établir en Amérique, où les États-Unis prétendent franchir toutes les bornes. Cette puissance brutale ne viole-t-elle pas le droit des gens nécessaire par son esclavage et ses pirateries. N’a-t-elle