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présente sans cesse : tout celà n’existe plus ! Les missions du Paraguay sont détruites ; les Sauvages rassemblés avec tant de fatigue, sont errans de nouveau dans les forêts, ou plongés vivans dans les entrailles de la terre. On a applaudi à la destruction d’un des plus beaux ouvrages qui fût sorti de la main des hommes… et tandis que les Indiens retombaient au Nouveau Monde dans une horrible servitude,[1] tout retentissait en Europe du bruit de notre philanthropie et de notre amour de la liberté des peuples. Ces honteuses variations de la nature humaine, selon qu’elle est agitée de passions contraires, flétrissent l’âme, et rendraient méchant, si l’on y arrêtait trop longtems les regards. »

Ce n’est pas sans raison que le plus beau génie de la France moderne s’émeut. C’est en effet un grand malheur et une grande honte pour l’humanité, — c’est une variation en même temps bien instructive que celle de la philosophie profane s’indignant noblement contre les féroces conquérans du Nouveau Monde, pour prendre peu après la défense de leurs brigandages affreux, poussés par le seul vent d’une implacable haine contre les enfans

  1. Je dois prendre sur moi de changer la phraséologie, qui est ainsi dans le Génie du Christianisme : “Cependant, alors même que nous triomphions, en voyant les Indiens retomber au Nouveau Monde dans une horrible servitude, tout retentissait en Europe du bruit de notre philantropie et de notre amour de la liberté.”