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dition contre la critique, qui est toujours plus prompte à démolir qu’à édifier, ce grand prince avait oublié la seule institution à l’appui de laquelle un système ressemblant à celui des Incas aurait pu se maintenir : — il avait laissé subsister la liberté des contrats. Lycurgue n’avait guères été plus prévoyant. Les Incas tinrent dans un parfait équilibre parce qu’ils n’admirent point les conventions. Cela en est si vrai que Locke nous dit, dans son traité du gouvernement, que les hommes se sont tacitement soumis à l’inégalité des fortunes en fesant entre eux des conventions. Puisque, ajoute-t-il, l’or et l’argent qui, comparés à la nourriture et aux vêtemens, sont moins utiles à la vie, empruntent toute leur valeur des conventions des hommes, il devient évident que ceux-ci ont consenti à reconnaître l’inégalité et la disproportion dans la possession de la terre. Ils ont créé en effet pour chacun le moyen de posséder légitimement plus qu’il n’était nécessaire à son usage, en recevant en échange pour l’excédant cet or et cet argent, qui peuvent être amassés sans faire tort à personne. Le partage des choses et l’inégalité des possessions privées, les hommes les ont pratiqués, en dehors même des liens de la société et sans contrat par le seul fait qu’ils ont attaché une valeur à l’or et à l’argent.” — Seuls donc les Incas obtinrent l’équilibre, et comme conséquence, le bien-être de chaque famille, de