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triomphant des jésuites un précieux allié qu’ils ménagent.

Trente-neuf ans après sa naissance, Pascal meurt de vieillesse. Il laisse des feuillets incomplets et épars ; on hésite devant ce brillant chaos, on tâtonne, on rapproche les fragments, on célèbre la magnificence du monument à peine entrevu. Pascal, admirable quand il achève, est déclaré par les bons juges, plus admirable encore quand il est interrompu. Chaque ligne tombée de sa plume est traitée comme une pierre précieuse.

Pascal est grand dignitaire dans le inonde des esprits : on serait tenté de l’appeler Monseigneur. On se compromet moins en méconnaissant La Fontaine ou Molière qu’en parlant légèrement de Pascal. Une faiblesse ou un tort de Pascal, quand l’évidence contraint à les avouer, doivent prouver seulement l’imperfection de la nature humaine.

Le lecteur des Lettres provinciales subit une épreuve. Devenu son propre juge, il se demande : Ai-je le goût délicat ? suis-je sensible à la beauté du style ? C’est avec complaisance qu’il se prend à sourire ; l’indifférence