Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/542

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mais quelque amour de gloire, ou pouvoir du mal-heur
Qui luy face és combats esprouver sa valeur,
Avienne qu’en fortune, et sagesse, et vaillance,
On le voye esgaller l’autheur de sa naissance,
Et n’avoir nul besoin que quelqu’un l’esveillant,
Luy monstre qu’il nasquit d’un pere si vaillant.
Mais le laurier bruslé frivolement craquette,
Et pour mascher sa fueille, on n’en est point prophete,
Ou le soin d’attiedir ces courageux boüillons
Qui font chercher la mort entre cent bataillons,
Travaillera plustost les recteurs de sa vie,
Que ne fera celuy d’en exciter l’envie.
Et comme un jour Thesee, estant prest de perir,
Fut cogneu fils du roy qui le faisoit mourir,
À l’or de son espee engravé d’une marque :
Il sera recogneu pour fils d’un tel monarque
Aux exploits de la sienne, et parmy des hazards
Où l’on eust veu pallir les deux premiers Cesars.
Qu’il soit prince clement mais que par sa clemence
Il ne nourrisse point l’audace et l’insolence
Pareil à ces hyvers trop tiedes et trop doux,
Qui produisent la peste, ou le pourpre, et les cloux,
Et tous ces autres maux qui prennent nourriture
Des humeurs que le temps produit en pourriture :
Ou font vivre et germer, par les champs labourez.
Ces vers de qui souvent les bleds sont devorez :
Ou les tiges rampants de ces mauvaises herbes
Qui suffoquent en vers l’esperance des gerbes.
Non qu’il ne soit cogneu qu’on ne se peut graver
Tant d’honneur sur le front à perdre qu’à sauver ;
Qu’infiniz animaux que la poussiere engendre,
Peuvent oster la vie, et nul que Dieu la rendre :
Mais en trop pardonnant, on faict que trop d’esprits
Ont besoin de pardon, par un lasche mespris
Des loix, et des senats, comme n’estants les brides,
Ou les espouvantaux que des ames timides.