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Encourage les grecs, et leur prestant la main,
Les appelle du havre à ce sac inhumain.
Là, Pallas secoüant son horrible Gorgonne
Dans le sein d’une nuë où claire elle rayonne,
Se plante en leur faveur sur la pointe du fort :
Et Jupiter luy-mesme en seconde l’effort,
Leur accroist le courage, et durant ces allarmes
Rend tous les autres dieux bandez contre vos armes.
Mon fils, retire toy, mets fin à tes combats :
Je me tiendray par tout voisine de tes pas,
Et sans aucun peril ma conduite fidelle
Te fera regaigner la maison paternelle.
Achevant ces propos sa lumiere me fuit,
Et se cache en l’épais des ombres de la nuit.
Adonc la veuë affreuse et les formes horribles
Des dieux nos ennemis me devindrent visibles,
Adonc tout Ilion se laissant consumer,
Me sembla pour jamais dans son feu s’abysmer,
Et dés les fondements destruitte et subvertie
Trebucher la cité par Neptune bastie.
Comme quand aux sommets des hauts monts éventez,
La main des laboureurs assaut de tous costez
Un vieil fresne sauvage à grands coups de coignee
Que redouble à l’envy la troupe embesoignee :
Il menace long temps de son chef ombrageux
Chancelant sous les coups du tranchant outrageux,
Qui fait trembler d’horreur ses vertes cheveleures :
Jusqu’à tant qu’à la fin, vaincu de ses blesseures,
Il chancelle et gemit pour la derniere fois,
Et fracasse en tombant infinis petits bois.
Je descens, et conduit du soin de la deesse,
Sans malheur je traverse et les feux et la presse