Page:Bertaut - Les Œuvres poétiques, éd. Chenevière, 1891.djvu/308

Cette page n’a pas encore été corrigée

 et ne veut que j’espere
Rien de toy qu’impiteux et sanglamment severe.
Mais sçaches que si plaindre et hair son peché,
Se voir de repentance amerement touché,
Porter les yeux couverts de larmes eternelles,
Se mettre au premier rang des ames criminelles,
Pour laver son erreur desirer de mourir,
Voisine l’innocence, ou la peut acquerir,
J’ay purgé mon forfait, et mon cœur miserable
Est autant innocent que ma main est coulpable.
Cependant je n’attens ny requiers rien de toy
Sinon que ton regard se jette dessus moy,
Pour me voir immoler, frappé de repentance,
Sur ce funeste autel de publique vengeance
Et remarque du ciel avec quel déplaisir
Non d’aller à la mort, car c’est mon seul desir
Mais de t’avoir osté si meschamment la vie,
Je vien pour voir la mienne icy m’estre ravie,
Et presenter ma teste au trenchant inhumain
Du fer qui doit punir l’offence de ma main.
Las ! Nous ne pensions pas quand un sainct hymenee
Joignit de nos destins la trame infortunee,
Qu’un si triste naufrage en abregeant le cours,
Et brisant nostre vie au milieu de nos jours,
Nous fist tous deux perir d’une fin malheureuse,
Toy d’une violente, et moy d’une honteuse,
Toy par ma main cruelle, et moy par le trenchant
D’un bourreau detestable au poteau m’attachant :
Ta jeunesse et bien nee et chastement nourrie,
Et ma main dés l’enfance és perils aguerrie,
Sembloient devoir un jour cueillir de plus doux fruicts
Des saints enseignemens où nous estions instruits :
Mais ainsi l’a voulu ce monarque supréme
Contre qui murmurer ce seroit un blaspheme.