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Pour le moins leur memoire incessamment vivante
La maintient immortelle au cœur de son espoux,
À qui bien que la perte en soit dure et cuisante,
Le nom ne laisse pas d’en estre cher et doux.
Aussi portant en l’ame une juste tristesse
De voir que ceste tombe enferme tout son bien,
Donne-til ces souspirs au regret qui le blesse,
Et grave sur ce cœur les paroles du sien.
Paroles qui font voir que rien ne le contente,
Sinon le souvenir de leurs aimables feux,
Et que dedans ce vase où trompant son attente
La mort n’a mis qu’un cœur, l’amour en loge deux.

EPITAPHE MME DE VILLERON

Celle qui dort icy fut richement paree
De toutes les vertus qu’on impetre des cieux,
Aussi son ame au ciel s’est-elle retiree
Quand la mort s’est permis de luy clorre les yeux.
Nul amour que divin ne l’a jamais ravie :
Bien vivre et bien mourir fut son plus grand soucy ;
Et peut-on justement tesmoigner de sa vie,
Que pour mourir heureuse il falloit vivre ainsi.
Nous pleurerions sa mort de mille et mille plaintes,
S’il nous estoit permis de plorer son bon-heur :
Mais elle estant au ciel entre les ames saintes,
Nos pleurs luy feroient tort en luy faisant honneur.

SUR