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Mais en cedant aux loix de ta douleur extréme,
Souvien-toy de la France, et de ton diadéme,
Certain qu’en cet auguste et glorieux sommet
Ton sceptre te defend ce qu’amour te permet.
Assez as-tu pleuré mes membres froids et palles :
Converty le surplus de ces larmes royales
Que respand sur ma mort ton cœur plein de pitié,
En d’autres monumens de constante amitié :
Soit preservant mon nom d’un oubly perdurable,
Soit donnant à mes os un sepulchre honorable
Où l’on voye à jamais en gloire reposer
Les cendres qui t’ont peu quelquefois embraser.
Je ne te laisse point une insensible image
De l’air qui donnoit vie aux traits de mon visage :
Mais trois vivans portraits par le ciel animez,
Où les tiens et les miens tendrement exprimez
Font desja remarquer en ceux de leur enfance
Que d’un roy genereux ils ont pris leur naissance.
Le ciel vueille inspirer ceste heureuse beauté
Que tu dois en ton thrône asseoir à ton costé,
De les voir d’un bon oeil, de leur estre propice,
Et d’un cœur favorable accepter leur service :
Ne les dédaignant point pour estre nez de moy,
Mais plustost les aymant pour estre issus de toy,
De qui tenir le bien et la gloire de naistre
C’est assez de grandeur à qui que ce puisse estre.
Et toy-mesme, ô grand roy, vueille les eslever
À tout l’heur où le ciel leur permet d’arriver :
Aime-les, defends-les, et d’une amour de pere
Quelquefois les baisant souviens-toy de leur mere
Qui desormais, helas ! Hostesse d’un cercueil
N’a plus d’yeux pour les voir si ce n’est par ton
Œil :