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Sa faveur vous defende, et sauve en vous sauvant,
Cet estat dont l’espoir en vous seul est vivant.
Entens ceste requeste, ô monarque suprême
Des peuples, des seigneurs, des rois, et des dieux mesme :
Couvre ce vaillant roy de tes bras tout puissans
Contre tant de perils sans fin le menaçans :
N’endure qu’aucun fer s’abreuve en ses entrailles :
Estens dessus son chef, au milieu des batailles,
Cest invisible escu d’immortel diamant
Destiné pour couvrir ceux qui te bien-aimant
Et bien-aimez de toy sont armez de ta garde :
Et pour nostre bon-heur plus d’un siecle retarde
L’heure qui ravissant sa presence à nos yeux,
Le doit, loin de la terre, emporter dans les cieux.
Et vous roy sans pareil, qui d’un cœur magnanime
Vous offrez tous les jours ainsi qu’une victime
En sacrifice à Mars, parmy tant d’ennemis,
Pour ceux qu’un juste regne à vos loix a soûmis :
Si l’amour de nostre heur ardamment vous embraze,
Si vous n’ignorez point d’estre l’unique baze
Sur qui fatalement nostre espoir est fondé,
Par l’heur d’un privilege à nul autre accordé,
Pour Dieu, prince invaincu, concevez quelque envie
D’embrasser desormais le soin de vostre vie,
Comme la seule mort des desseins insensez
Qui ne sçauroient fleurir si vous ne perissez.
Ne vueillez plus jamais l’exposer à l’outrage
D’un barbare soldat, ny souffrir que sa rage
Face encore trembler sous la fiere mercy
D’un mousquet sans pitié ce grand empire icy,
Monstrant aux yeux du ciel qu’il soit en sa puissance
De briser pour jamais le sceptre de la France.
C’est assez tenté Dieu parmy tant de perils :
Les traces de vos coups à grand peine gueris,
Et saignans tous les jours dedans nostre pensee
Assez en vous blessant ont nostre ame blessee.
Quel honneur si fameux, quels lauriers si prisez
Cherchez-vous ès hazards où vous vous exposez,