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D’or, et de broderie en cent lieux parsemee :
Mais ce qui n’est point d’eux est seul prisable en eux :
Semblables à ces flots richement sablonneux
De qui, pour le seul or, l’arene est estimee.
Toy que le tout-puissant a luy mesme vestu
D’un manteau tout filé des mains de la vertu,
Marche comme en triomphe au milieu de tes princes ?
Non paré de rubis rayonnants de clarté,
Mais de la foy, clemence, et constante equité
Dont tu conduit le frein qui regit tes provinces.
Ce sont les ornements qui font que ta grandeur
Reluit toute de gloire, et de puissance et d’heur,
Conjoints à ceste auguste et fameuse vaillance,
Qui sans crainte en l’effroy des jours plus perilleux,
A produit de ta main des faits si merveilleux,
Que presque la merveille en destruit la creance.
Tels effects de vertu par la terre annoncez
Te sont comme des traits vivement élancez,
Dont l’ame est par l’oreille heureusement attainte :
Ils percent tous les cœurs, te rendent tout soumis :
Et frappent tes sujets quand et tes ennemis :
Mais les uns c’est d’amour, et les autres de crainte.
Ô dieu que ton honneur s’en rendra glorieux !
Ton throsne se verra des ans victorieux :
Ton sceptre aura le nom d’un sceptre de justice :
Tes plus pesantes loix deviendront un doux faix :
Tu verras l’univers adorer tes beaux faits,
En paix avecques tout, fors avecques le vice.
Car tu n’es que douceur, foy, sagesse et bonté :
Le vice te desplaist ; tu hais la cruauté :
Tu cheris la raison ; tu defends l’innocence :
Ton cœur n’est que pitié ; ton throsne que splendeur.
Qui t’approche sans craindre, ignore ta grandeur ;
Mais qui t’approche en crainte, ignore ta clemence.