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Mais premier que mes chants mes ans s’acheveroient,
Si les vers de cet hymne en chantant honoroient
Chacun de vos beaux faits d’un digne tesmoignage :
C’est assez si je dy, ma trame accourcissant,
Qu’en royalles vertus vous allez devançant
Tous ceux qui plus fameux vous devancent en âge.
Ah ! Que les fiers destins qui dominent sur nous
Ne vous ont-ils fait naistre en un siecle plus doux,
Et plus favorisé de la bonté celeste !
Helas, nous devoit-il tant de mal arriver,
Que la rigueur du sort nous forçast d’éprouver
Sous un roy si clement un regne si funeste !
La France ne vid onc un roy plus accomply,
Cependant le venin dont l’estat est remply,
Par son corps languissant plus que jamais pullule,
L’ame des loix vivante on voit mourir les loix,
Trajan tient en sa main le grand sceptre gaulois,
Et le peuple ressent les ans de Caligule.
En qui plus desormais nous faut-il esperer,
Si le cours de ce mal ne cessant d’empirer,
Malgré tous vos conseils dure en sa violence ?
Bien pourrons nous alors nous resoudre à perir :
Et ce qu’avec tant d’art vous n’aurez sceu guerir,
L’estimer incurable à l’humaine prudence.
Mais nous ne serons point si long temps malheureux
Non, rien n’empeschera qu’un roy si genereux
Surmontant nos malheurs ces tempestes ne calme :
Vous les dompterez, sire, et la mesme vertu
Qui pour rendre ce monstre à vos pieds abbattu
Vous met l’épee au poing, vous y mettra la palme.
Poursuivez seulement d’un pied ferme et constant :
Et malgré les travaux qui vous vont combattant,
Chassez en fin ce mal du fond de nos entrailles :
Puis donnez au seigneur le fruict de vos beaux faicts,
En faisant triompher au milieu de la paix,
Celuy qui vous fait vaincre au milieu des batailles.

AU