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 FORME DE CONFESSION

L’ennuy qui rend mes yeux si fertiles en larmes
Durant le cours des maux dont je suis oppressé ;
Ce n’est point, ô seigneur, d’endurer ces allarmes,
Mais de les meriter pour t’avoir offensé.
Ma faute, et non ma peine, est ce qui me tourmente :
J’en souspire la cause, et non pas les effects :
Et battant ma poitrine, à par moy je lamente
Non les maux que j’endure, ains les maux que j’ay faicts.
Ah que ne puis-je dire au fort de mon angoisse
Comme l’un de tes saincts disoit en sa langueur :
Seigneur, fay pour le moins que mon ame cognoisse
Pourquoy ta main me traitte avec tant de rigueur.
Helas tout au contraire, il faut qu’en mon supplice
Je crie, en me plaignant d’un trop doux jugement,
Ô seigneur tu commets, tu commets injustice
Ne me punissant pas d’un plus aspre tourment.
Car quel poinct de ta loy sert de regle à nostre ame,
Que ton oeil n’ait point veu ma fureur transgresser ?
Mon cœur s’en souvenant d’horreur presque se pasme
De voir qu’un peu de cendre ait tant peu t’offenser.
Ce cœur que ton esprit lavant par le baptesme
Daigna choisir pour temple et purger de peché,
Je l’ay donné pour siege à l’esprit de blaspheme,
Et de son vif autel ton portrait arraché.
De venimeux serpents j’en ay faict un repaire,
D’un impudique feu j’ay bruslé ses parvis :