se trouverait à peu près à l’unisson du Concertina exécutant le même passage,
écrit de cette absurde manière |
Cette ancienne prétention des acousticiens d’introduire de vive force le résultat de leurs calculs dans la pratique d’un art, basé avant tout sur l’étude des impressions produites par les sons sur l’oreille humaine, n’est plus soutenable aujourd’hui.
Tant il est vrai que la musique la repousse énergiquement, et ne peut exister qu’en la repoussant.
Tant il est vrai même que les modifications contraires de l’intervalle, entre deux sons qui s’attirent (dans la pratique musicale) sont des nuances très fines que les Virtuoses et les chanteurs doivent employer avec beaucoup de précautions, dont les éxécutans d’orchestre doivent s’abstenir en général et que les compositeurs dans la prévision de leur emploi, doivent traiter d’une façon spéciale.
Tant il est vrai enfin, que l’immense majorité des musiciens s’en abstient instinctivement dans les ensembles harmoniques. D’où il résulte que les sons prétendus inconciliables par les acousticiens se concilient parfaitement dans la pratique musicale, et que les relations déclarées fausses par le calcul, sont acceptées comme justes par l’oreille, qui ne tient aucun compte des différences inappréciables, ni du raisonnement des mathématiciens. Il n’y a presque pas une partition moderne où, soit pour faciliter l’exécution, soit pour quelque autre raison, et souvent sans raison, le compositeur n’ait écrit des passages harmoniques ou mélodiques, à la fois dans le ton dièzé pour une partie de l’orchestre ou du chœur, et dans le ton bémolisé pour l’autre.
Les Hugenots (Meyerbeer) |
ou mélodiquement : |
Ou sous l’apparence de deux tons différents dont deux notes seulement se trouvent en relation Enharmonique, comme dans ce passage du Freyschütz de Weber :
Ici les Violoncelles et les Contre-basses ont l’air de jouer en Sol mineur, pendant que les Trombones semblent jouer en Si ♭ mineur.
Dans cet exemple, si les Violoncelles et les Contre-basses faisaient leur fa dièze trop haut, et si les Trombones faisaient leur sol bémol trop bas, sans doute on entendrait une discordance, mais pour que l’exécution soit bonne il ne faut pas que cela soit ; et alors les deux sons, dont chacun a une tendance contraire à celle de l’autre, s’accordent néanmoins parfaitement.
Dans toutes les occasions semblables l’orchestre devient ainsi un grand instrument à tempérament. Il le devient même en une foule d’autres cas, et sans que les musiciens qui le composent s’en doutent.