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dans les cellules dites sensitives de l’écorce cérébrale ? Je ne comprends pas, je ne comprendrai jamais qu’il y puise la miraculeuse puissance de se transformer en représentation des choses, et je tiens d’ailleurs cette hypothèse pour inutile, comme on le verra tout à l’heure. Mais ce que je vois très bien, c’est que ces cellules des diverses régions dites sensorielles de l’écorce, cellules interposées entre les arborisations terminales des fibres centripètes et les cellules motrices de la zone rolandique, permettent à l’ébranlement reçu de gagner à volonté tel ou tel mécanisme moteur de la moelle épinière et de choisir ainsi son effet. Plus se multiplieront ces cellules interposées, plus elles émettront de prolongements amiboïdes capables sans doute de se rapprocher diversement, plus nombreuses et plus variées aussi seront les voies capables de s’ouvrir devant un même ébranlement venu de la périphérie, et plus, par conséquent, il y aura de systèmes de mouvements entre lesquels une même excitation laissera le choix. Le cerveau ne doit donc pas être autre chose, à notre avis, qu’une espèce de bureau téléphonique central : son rôle est de « donner la communication », ou de la faire attendre. Il n’ajoute rien à ce qu’il reçoit ; mais comme tous les organes perceptifs y envoient leurs derniers prolongements, et que tous les mécanismes moteurs de la moelle et du bulbe y ont leurs représentants attitrés, il constitue bien réellement un centre, où l’excitation périphérique se met en rapport avec tel ou tel méca­nisme moteur, choisi et non plus imposé. D’autre part, comme une multitude énorme de voies motrices peuvent s’ouvrir dans cette substance, toutes ensemble, à un même ébranlement venu de la périphérie, cet ébranlement a la faculté de s’y diviser à l’infini, et par