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Mais ce mouvement se déduit, comme nous allons voir, des nécessités fonda­mentales de la vie ; et il est aisé de voir aussi pourquoi les « associations » que nous paraissons former le long de ce mouvement épuisent tous les degrés successifs de la contiguïté et de la ressemblance.

Supposons en effet, un instant, que notre vie psychologique se réduise aux seules fonctions sensori-motrices. En d’autres termes, plaçons-nous, dans la figure schématique que nous avons tracée (page 181), à ce point S qui correspondrait à la plus grande simplification possible de notre vie mentale. Dans cet état, toute perception se prolonge d’elle-même en réactions appro­priées, car les perceptions analogues antérieures ont monté des appareils moteurs plus ou moins complexes qui n’attendent, pour entrer en jeu, que la répétition du même appel. Or il y a, dans ce mécanisme, une association par ressemblance, puisque la perception présente agit en vertu de sa similitude avec les perceptions passées, et il y a là aussi une association par contiguïté, puisque les mouvements consécutifs à ces perceptions anciennes se repro­duisent, et peuvent même entraîner à leur suite un nombre indéfini d’actions coordonnées à la première. Nous saisissons donc ici, à leur source même et presque confondues ensemble, — non point pensées, sans doute, mais jouées et vécues, — l’association par ressemblance et l’association par contiguïté. Ce ne sont pas là des formes contingentes de notre vie psychologique. Elles repré­sentent les deux aspects complémentaires d’une seule et même tendance fondamentale, la tendance de tout organisme à extraire d’une situation donnée ce qu’elle a d’utile, et à emmagasiner la réaction éventuelle, sous forme d’habitude motrice, pour la faire servir à des situations du même genre.

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