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à la démonstration complète du mécanisme cartésien, qu’aura peut-être réalisée Einstein. Or, ce dynamisme impliquait l’existence d’un mouvement absolu. On pouvait encore admettre la relativité du mouvement dans le cas de la translation rectiligne non accélérée ; mais l’apparition de forces centrifuges dans le mouvement de rotation semblait attester qu’on avait affaire ici à un absolu véritable ; et il fallait aussi bien tenir pour absolu tout autre mouvement accéléré. Telle est la théorie qui resta classique jusqu’à Einstein. Il ne pouvait cependant y avoir là qu’une conception provisoire. Un historien de la mécanique, Mach, en avait signalé l’insuffisance[1], et sa critique a certainement contribué à susciter les idées nouvelles. Aucun philosophe ne pouvait se contenter tout à fait d’une théorie qui tenait la mobilité pour une simple relation de réciprocité dans le cas du mouvement uniforme, et pour une réalité immanente à un mobile dans le cas du mouvement accéléré. Si nous jugions nécessaire, quant à nous, d’admettre un changement absolu partout où un mouvement spatial s’observe, si nous estimions que la conscience de l’effort révèle le caractère absolu du mouvement concomitant, nous a joutions que la considération de ce mouvement absolu intéresse uniquement notre connaissance de l’intérieur des choses, c’est-à-dire

  1. Mach, Die Mechanik in ihrer Entwicklung, II, VI.