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par rapport à  : pourquoi ne disions-nous pas aussi bien que c’était qui se déplaçait par rapport à  ? Simplement parce que était censé participer à l’immobilité absolue de l’éther. Mais il n’y a plus d’éther[1], plus de fixité absolue nulle part. Nous pourrons donc dire, à volonté, que se meut par rapport à , ou que se meut par rapport à , ou mieux que et se meuvent par rapport l’un à l’autre. Bref, ce qui est réellement donné est une réciprocité de déplacement. Comment en serait il autrement, puisque le mouvement aperçu dans l’espace n’est qu’une variation continue de distance ? Si l’on considère deux points et et le déplacement de « l’un d’eux », tout ce que l’œil observe, tout ce que la science peut noter, est le changement de longueur de l’intervalle[2]. Le langage exprimera le fait en disant que se meut, ou que c’est . Il a le choix ; mais il serait plus près encore de l’expérience en disant que et se meuvent par rapport

  1. Nous ne parlons, bien entendu, que d’un éther fixe, constituant un système de référence privilégié, unique, absolu. Mais l’hypothèse de l’éther, convenablement amendée, peut fort bien être reprise par la théorie de la Relativité. Einstein est de cet avis (Voir sa conférence de 1920 sur « L’Éther et la Théorie de la Relativité »). Déjà, pour conserver l’éther, on avait cherché à utiliser certaines idées de Larmor. (Cf. Cunningham, The Principle of Relativity, Cambridge, 1914, chap. xv).
  2. Sur ce point, et sur la « réciprocité » du mouvement, nous avons appelé l’attention dans Matière et Mémoire, Paris, 1896, chap. IV, et dans l’Introduction à la Métaphysique (Revue de Métaphysique et de Morale, janvier 1903).