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apportera avec lui l’immobilité ; et tout point du disque où siège le physicien réel est un point d’où l’effet observé ne devra plus s’interpréter en termes d’inertie, mais en termes de gravitation ; celle-ci, en tant que gravitation, ne change rien au rythme du Temps, rien à la marche des horloges ; elle ne le fait que lorsqu’elle se traduit en mouvement aux yeux d’un physicien pour lequel les horloges et le Temps du système, où il ne siège plus[1], sont devenus de simples représentations. Disons donc, si nous maintenons notre physicien réel en , que son horloge, après avoir voyagé vers la périphérie du disque, rentrera en telle quelle, marchant comme elle marchait, n’ayant pris aucun retard. La théorie de la Relativité exige simplement ici qu’il y ait eu un retard à l’instant précis où elle allait rentrer en . Mais à cet instant précis elle était encore, comme elle l’était déjà à l’instant précis où elle quittait le système, fantasmatique.

On tombe d’ailleurs dans une confusion analogue, admissible chez le physicien, dangereuse pour le philosophe, quand on dit que, dans un système tel que le disque tournant, « il n’est pas possible de définir le temps au moyen d’horloges immobiles

  1. Nous disons que le physicien ne siège plus dans le système. Nous entendons par là, naturellement, qu’il ne veut plus y siéger. Il peut fort bien y demeurer en fait : seulement if s’est transporté hors de ce système par la pensée, et il en a adopté un autre comme système de référence, dès qu’il a interprété la gravitation en termes de mouvement.