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comme si la Terre était immobile. Tel est le fait. Où est l’explication ?

Mais d’abord, que parle-t-on des vitesses de notre planète ? La Terre serait-elle donc, absolument parlant, en mouvement à travers l’espace ? Évidemment non ; nous sommes dans l’hypothèse de la Relativité et il n’y a plus de mouvement absolu. Quand vous parlez de l’orbite décrite par la Terre, vous vous placez à un point de vue arbitrairement choisi, celui des habitants du Soleil (d’un Soleil devenu habitable). Il vous plaît d’adopter ce système de référence. Mais pourquoi le rayon de lumière lancé contre les miroirs de l’appareil Michelson-Morley tiendrait-il compte de votre fantaisie ? Si tout ce qui se produit effectivement est le déplacement réciproque de la Terre et du Soleil, nous pouvons prendre pour système de référence le Soleil ou la Terre ou n’importe quel autre observatoire. Choisissons la Terre. Le problème s’évanouit pour elle. Il n’y a plus à se demander pourquoi les franges d’interférence conservent le même aspect, pourquoi le même résultat s’observe à n’importe quel moment de l’année. C’est tout bonnement que la Terre est immobile.

Il est vrai que le problème reparaît alors à nos yeux pour les habitants du Soleil, par exemple. Je dis « à nos yeux », car pour un physicien solaire la question ne concernera plus le Soleil : c’est maintenant la Terre qui se meut. Bref, chacun des deux