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silencieux, cachés par de grands arbres, contemporains de feu Cromwell… — 1653 ! Tu blagues. — On y a pris le bois de l’échafaud de Charles 1er. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’Histoire. — Et alors ? — Alors, c’est une villa délicieuse, verdoyante, fleurie, divisée en jardinets que bordent des barrières de treillage enguirlandées de capucines. Par dessus ces aimables remparts ajourés, percés de portes, d’ailleurs toujours ouvertes, les peintres et statuaires du Holland Park voisinent et s’allument la pipe les uns aux autres. Aussi ce bois (de justice) est-il devenu un phalanstère d’art auquel préside le vieux George Frederic Watts, à qui je vais te présenter, si Prinsep me le permet. — Qui, Prinsep ? — Prinsep est le gardien du phalanstère et particulièrement du père Watts, son dieu terrestre — Un dog ? — Non, un brave peintre lui aussi, doublé d’un écrivain, et l’ami du Prince de Galles, avec qui il a fait le voyage traditionnel aux Indes. Il en a même publié la relation. Demande-la-lui, ça le flattera doublement, car il l’a aussi illustrée. C’est par lui qu’il faut passer pour voir le « maître de la mort ». — Quoi ? — Rien, tu comprendras dans son atelier.

La réception de l’auteur d’Imperial India fut telle que de Nittis l’avait présagée, réservée à l’abord et déclinatoire. Le maître était un peu souffrant et il n’aimait pas les visites, d’étrangers surtout. En outre il avait « ses fantômes ». Nous ferions mieux de lui demander audience et rendez-vous par lettre. De Nittis crut devoir me présenter et le nom de Théophile Gautier, magique en Angleterre, entr’ouvrit la sésame, dont quelques compliments sur une toile que le « dog » avait au chevalet, — « une réception des